Les opérations
Pr. Gilles Fourtanier Document d’information remis au patient
Les interventions chirurgicales qui permettent de faire perdre du poids sont indiquées pour des patients dont la prise de poids est très importante. Cette surcharge s'évalue à partir de l'Index de Masse Corporelle (IMC) qui est le rapport du poids en kg, sur la taille exprimée en mètre carré.
Un IMC normal se situe entre 20 et 25 kg/m². On parle de surcharge pondérale entre 25 et 30 kg/m², d'obésité modérée entre 30 et 40 kg/m² (classe 1 jusqu’à 35 et classe 2 jusqu’à 40 kg/m²) et d'obésité morbide ou classe 3 au dessus de 40 kg/m². Le terme d'obésité morbide signifie que l'espérance de vie est diminuée en raison des complications possibles, secondaires à l'excès de poids comme diabète, hypertension artérielle, infarctus du myocarde, insuffisance respiratoire, apnée du sommeil, douleurs articulaires...
L’étude suédoise SOS (Swedish Obesity Study) a comparé les 2 types de traitements connus dans cette situation d’obésité morbide stabilisée depuis plusieurs années, à savoir soit une prise en charge médicale prolongée par des médecins nutritionnistes soit une opération. Cette étude a inclus 4000 malades qui ont été répartis dans chacun des deux groupes avec un suivi de 10 ans. Les résultats sont les suivants : - dans le groupe des malades non-opérés, 100% des malades avaient pris du poids et leurs comorbidités persistaient ; - les seules pertes de poids importantes et durables ont été observées dans le groupe des malades opérés, avec des résultats variables selon la technique utilisée. Surtout les comorbidités ont été améliorées, voire ont disparu.
Il est donc maintenant acquis que les interventions chirurgicales sont le seul traitement ayant fait la preuve d’une efficacité démontrée dans la prise en charge de l’obésité morbide. Actuellement, quatre interventions sont envisageables, regroupées sous le terme de chirurgie bariatrique : - la gastroplastie par anneau ajustable, - la « sleeve » gastrectomie, - le by-pass gastrique, - le « duodenal-switch ».
Toutes ces interventions sont faites par coelioscopie (autre terme laparoscopie) car les suites sont plus confortables, sauf nécessité obligeant à faire une laparotomie (ouverture de l’abdomen par une incision).
La décision d’opérer sera prise au terme d’un suivi pluridisciplinaire de quelques mois par le médecin nutritionniste, la diététicienne et la psychologue qui permettront de vous préparer à l’opération et de vous proposer la meilleure opération concernant votre obésité au terme d’une réunion de concertation entre l’équipe de l’obésité et vous-même. Votre médecin traitant en sera informé. Quand la décision aura été prise, un bilan préopératoire sera nécessaire pour l‘anesthésiste (cœur et poumon) et pour le chirurgien, échographie pour rechercher des calculs dans la vésicule et voir le foie, ainsi qu’une fibroscopie gastrique pour éliminer un germe, l’Hélicobacter Pylori qu’il faudra traiter avant l’intervention (dans ce cas, la durée du traitement antibiotique est de 10 jours).
GASTROPLASTIE PAR ANNEAU AJUSTABLE
L’intervention consiste à faire une petite poche gastrique au moyen d’un anneau placé à la partie haute de l’estomac. La sensation de faim est contrôlée et on ne peut faire que de petits repas. Toutefois le grignotage est possible et il est nécessaire, pour obtenir une perte de poids satisfaisante, d’avoir une alimentation équilibrée, c’est à dire sans apports excessifs de sucreries et de matières grasses et sans grignotage. La présence de l’anneau constitue une gêne au passage des aliments solides comme le pain et la viande rouge. Il faut mastiquer soigneusement, manger lentement et dans le calme sans stress.
Cette intervention comporte des risques opératoires minimes. Elle permet d’obtenir en moyenne une perte de 10 à 12 points d’IMC sur 18 mois. Toutefois le réglage du remplissage du réservoir nécessite des consultations fréquentes et sur le long terme environ 25% des malades doivent être réopérés pour enlever l’anneau en raison d’éventuelles complications (une dilatation de l’estomac, de l’oesophage ou une migration de l’anneau à l’intérieur de l’estomac) ou d’inefficacité. En cas de grossesse, il faudra dégonfler l’anneau et reprendre le remplissage quelques mois après l’accouchement sauf en cas d’allaitement.
Les vomissements sont fréquents dans la vie quotidienne si on ne respecte pas les règles pour s’alimenter, pouvant entraîner des restrictions dans la vie sociale de peur de vomir en public. Sur le long terme (4-5 ans), on observe dans toutes les études une déviation du comportement alimentaire vers les sucreries et le fromage, vers les boissons énergisantes, avec pour conséquence une reprise de poids. Ainsi une sorte de contrat doit s’établir entre le patient et l’équipe médicale pour un suivi régulier afin d’éviter l’échec et aussi dépister une complication.
Il n’existe aucun moyen fiable de savoir si le comportement alimentaire du malade sera suffisamment adapté pour que l’opération donne une perte de poids et un confort alimentaire satisfaisant. Pour toutes ces raisons la gastroplastie par anneau ajustable n’est plus considérée comme une solution satisfaisante, pour la prise en charge de l’obésité morbide, sauf exceptions discutées entre le patient et l’équipe pluridisciplinaire.
La Sécurité Sociale demandera une Entente Préalable au chirurgien pour en accepter le remboursement.
« SLEEVE » GASTRECTOMIE
Cette intervention consiste à transformer l’estomac en un tube étroit (« sleeve » est le mot anglais pour la manche d’une chemise) à l’aide d’agrafes. Elle enlève 2/3 de l’estomac laissant seulement la partie distale, l’antre, qui a un volume d’environ 100ml entraînant donc la sensation de satiété au cours du repas. Par ailleurs l’opération supprime la zone gastrique supérieure qui sécrète la ghréline, hormone qui stimule le centre cérébral de la faim, et ainsi la suppression de cette zone inhibe la sensation de faim.
Elle est techniquement plus simple qu’un by-pass mais les risques de fistule post-opératoire sont identiques en raison de la possibilité d’une fuite entre 2 agrafes. Ainsi nous prenons des précautions pendant l’opération et aussi dans les jours qui suivent pour éviter et dépister cette éventuelle complication. Elle est estimée à 1% et demandera une prolongation de l’hospitalisation.
Dans les premières années, le résultat en terme de perte de poids est satisfaisant (supérieur à celui d’un anneau), avec un bon confort alimentaire. Les risques de carences sont moindres qu’avec un by-pass gastrique. Il pourra se produire un reflux gastro-oesophagien (RGO) d’acide qui sera amélioré par la prise de médicaments antiacides. Si vous avez un RGO avant l’opération, on vous proposera plutôt un by-pass gastrique qui n’a pas cet inconvénient.
Les résultats à long terme sont maintenant connus et favorables. Il est important de respecter les conseils d’alimentation pour éviter que l’estomac ne se dilate et qu’une reprise pondérale apparaisse. Dans ce cas, il faudrait alors envisager éventuellement une conversion en un by-pass gastrique ou en un « duodenal-switch ».
BY-PASS GASTRIQUE
Cette intervention associe d’une part la réalisation d’un petit estomac qui diminue le volume des repas et contrôle la sensation de faim, et d’autre part un court- circuit intestinal d’une longueur de 1,5 mètres d’intestin grêle, ce qui diminue l’absorption des aliments ingérés. Le confort alimentaire est bon avec un passage normal des aliments solides. Il est donc possible d’avoir une alimentation normale à condition de faire des petits repas. Lorsque le volume et la rapidité des repas sont bien maîtrisés, on n’observe pas de vomissements. Certains aliments, dont les sucreries, peuvent donner des malaises 1/4h après les repas (« dumping-syndrom »). Le résultat moyen à 2 ans est une perte de 60 % de l’excès de poids. Pour maintenir ce résultat sur le long terme, il est nécessaire de veiller à conserver une bonne hygiène alimentaire.
Le by-pass gastrique est une intervention plus complexe que l’anneau et que la « sleeve » gastrectomie. Les problèmes techniques sont maintenant bien maîtrisés pour les équipes expérimentées. Les complications immédiates (occlusions, hémorragies, péritonites) nécessitent une réintervention précoce dans 3% des cas environ et le risque de mortalité est de 0,3%. L’hospitalisation dure 3 à 5 jours. La convalescence est de trois semaines environ. A long terme, le risque principal est constitué par les occlusions, comme toute intervention s’adressant à l’intestin grêle.
Pour prévenir tout risque de carence, il est nécessaire de prendre un complément en fer, calcium et vitamines et ce traitement est permanent. Cette intervention n’engendre qu’une malabsorption modérée et les risques de diarrhée et d’amaigrissement excessif sont exceptionnels.
La surveillance est capitale même si tout va apparemment bien. Il faut prévoir trois consultations la première année et deux les années suivantes avec des prises de sang pour vérifier l’absence de carences. Si cette surveillance est correctement réalisée, il n’y a pas de risque à distance. Le recul sur ce type d’intervention est de 30 ans aux USA. Le résultat final en terme de poids sera fonction de l’hygiène de vie que vous reprendrez après l’opération, de la façon dont vous maîtriserez l’équilibre de votre alimentation (en particulier les apports de sucreries qui sont souvent bien tolérés un an après l’intervention). La reprise d’une activité physique et sportive est également très importante.
Il existe actuellement un consensus général pour affirmer que le by pass est l’intervention de référence (gold standard) en matière d’obésité morbide.
« DUODENAL SWITCH »
Le « duodenal-switch » est indiqué chez les super-obèses (IMC supérieur à 60 kg/m²). A ce niveau de surpoids, un by-pass gastrique risque de ne pas être assez efficace et il est démontré que le risque de mortalité péri- opératoire augmente considérablement (2%).
Comme le by-pass gastrique, cette intervention associe un petit estomac par une « sleeve » gastrectomie à un court-circuit intestinal, mais ce court-circuit est beaucoup plus long et engendre une malabsorption plus importante. On parle de court circuit bilio-pancréatique. L’intérêt majeur de cette technique est de pouvoir être réalisée en deux temps opératoires séparés de 12 à 18 mois permettant déjà un amaigrissement notable (environ une cinquantaine de kilos), ce qui diminue le risque opératoire. Le 1er temps est une « sleeve » gastrectomie et le 2ème temps le court circuit bilio-pancréatique.
confort alimentaire est assez bon mais il existe un risque de diarrhée et surtout de carences importantes en protides, vitamines et oligo-éléments ce qui nécessite une complémentation importante et une surveillance médicale étroite. Cette intervention nécessite également des apports importants de protéines dans l’alimentation (200g/j).
Il s’agit d’une procédure non chirurgicale consistant à mettre en place dans l’estomac un ballon gonflé à 500 cm³, par le gastroentérologue sous fibroscopie. Le mécanisme d’action est le même que celui d’un anneau avec les mêmes limites et la nécessité d’avoir une hygiène alimentaire bien maîtrisée. Le ballon doit obligatoirement être retiré au bout de 6 mois. Ceci se traduit par une reprise inéluctable du poids. Cette technique est réservée aux malades dont l’IMC est compris entre 30 et 35 kg/m² ou pour préparer un patient hyperobèse à une chirurgie bariatrique. Aucune étude n’a encore prouvé son efficacité sur le long terme. Cette procédure n’est pas prise en charge par la Sécurité Sociale.
SURVEILLANCE
APRES GASTROPLASTIE PAR ANNEAU AJUSTABLE et « SLEEVE » GASTRECTOMIE
L’anneau nécessite des consultations fréquentes au cours des 6 premiers mois pour trouver le bon niveau de gonflage de l’anneau. Il est rare que l’importance de l’amaigrissement provoque des carences en fer, calcium et vitamines. Il est très important de ne pas négliger l’apparition de vomissements. La survenue de vomissements répétés à 3 ou 4 repas consécutifs peut correspondre à une complication grave et nécessite une consultation en urgence pour faire une radiographie de l’estomac (TOGD) et dégonfler l’anneau. L’apparition de douleurs abdominales ou de brûlures remontant de l’estomac vers la gorge est également un signe de complication. Il ne faut pas se contenter de calmer les douleurs ou les brûlures par un traitement anti-ulcéreux. Il faut consulter et faire une radiographie et au besoin une fibroscopie gastrique rapidement. Il arrive souvent après quelques mois que l’on puisse faire des repas plus importants et que la sensation de faim ne soit plus contrôlée. Cela nécessite la reprise du gonflage de l’anneau. En cas de grossesse il est souhaitable de dégonfler l’anneau pour permettre une prise de poids normale et éviter tout risque de malformation chez le fœtus.
La « sleeve » gastrectomie nécessite les mêmes soins pour les prises alimentaires qui seront suivis par la diététicienne. Le médecin nutritionniste surveillera aussi le Fer sérique et vous recommandera si nécessaire la prise de Fer par la bouche et éventuellement de la Vitamine B12 en piqûre1 fois tous les 3 mois.
APRES un « BY-PASS » ou un “DUODENAL SWITCH »
Ces interventions comportent un risque de carence en fer, en calcium et en vitamines. Le traitement de supplémentation prescrit est définitif. Il est indispensable de faire une prise de sang 3 fois par an au cours des 2 premières années pour vérifier le taux sanguin de fer, de calcium et de vitamines et de montrer le résultat à votre chirurgien ou à l’équipe pluridisciplinaire coordonnée par le nutritionniste. Une mesure de la densité osseuse par tomodensitométrie est souhaitable 12 à 18 mois après l’intervention pour surveiller l’absence de déminéralisation osseuse. Une grossesse est possible après un by-pass, mais il ne faut pas qu’elle survienne pendant la période d’amaigrissement rapide, c’est-à-dire pendant l’année qui suit l’intervention. Il faut impérativement suivre une contraception, surtout s’il existait une stérilité liée à la surcharge pondérale. Il est souhaitable que tout souhait de grossesse soit programmé pour augmenter les apports de vitamines et d’oligo-éléments et éviter ainsi tout risque carentiel vis-à-vis du fœtus.
Dans les cas exceptionnels de vomissements importants et répétés, en particulier après « duodenal switch », peuvent survenir des complications neurologiques graves. Il est donc impératif de consulter rapidement votre chirurgien ou l’équipe pluridisciplinaire qui vous a suivi avant l’opération.
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